la fin du vieux maroc insolite du "petit journal " et du "petit parisien"
A travers cette nouvelle parution, Robert Chastel reconstitue l'histoire d'une période marocaine qui, selon lui, représente les années "extravagantes" du Royaume. Ces mêmes années qui mèneront le pays au marasme.
L'auteur aborde dans son ouvrage le Maroc, d'octobre 1891 à juin 1907. «Le Vieux Maroc insolite» décrit par les journaux de l'époque, le «Petit Journal » et du « Petit Parisien». Pour Robert Chastel, ce sont les années difficiles où le "Makhzen" archaïque n'a plus prise sur les événements. Celui-ci les subit, à travers les drames, les confrontations et même des divisions internes. Une époque qui coïncide, également, avec la fin du règne de Moulay Hassan (1873-1894) qui a pu maintenir l'équilibre du système tantôt avec diplomatie, tantôt avec force. Une stratégie entretenue d'une main de fer, le forçant à destituer le prince héritier, Mohammed, au profit de Moulay Abdel-Aziz, fils de l'esclave circassienne.
Mais, l'incapacité de Moulay Abdel-Aziz de tenir le pouvoir, vu son jeune âge (à peine 14 ans) et faute d'une éducation politique bien maîtrisée, font choir le pays dans des situations que ni Moulay Abdel-Aziz ni son successeur Moulay Hafid n'ont pu gérer. C'est cette phase d'avant Protectorat, achevant par la même le Vieux Maroc, que Robert Chastel dévoile en s'aidant de toute une collection bien illustrée du « Petit Journal » et du « Petit Parisien ».
« De 1891 à 1912, les événements du Maroc s'étalent de manière discontinue. J'en ai réuni soixante-deux numéros, c'est-à-dire toute la collection du « Petit Journal » illustré. On a pu reprocher à la revue de faire dans le sensationnalisme afin de doper les tirages», explique l'auteur. Et d'ajouter que tout au long des faits de cette série, les dessinateurs de ces deux journaux, avaient la difficulté d'interpréter un événement auquel ils n'avaient pas assisté et pour lequel ils ne possédaient pas de support photographique. « Toutefois, ces dessinateurs avait le génie des grands peintres des batailles historiques. Ce qui vaut pour le Royaume une iconographie inusitée, je dirai inespérée, teintée d'orientalisme, comme, par exemple, l'illustration des « Chefs de tribus jurant fidélité au Sultan du Maroc », en 1892 ou encore « La mort du général espagnol Margallo » en 1893.
Pour rendre crédible ses recherches, Robert Chastel a eu recours à des témoignages des Secrétaires de la Légation française de Tanger dont des écrivains de renom de l'époque. L'auteur a ainsi pu combler les lacunes de ces périodes historiques. Robert Chastel précise, par ailleurs, que le « Petit Journal» est parfaitement intégré au patrimoine culturel marocain». Pour compléter ses investigations, l'historien a fait appel, également, au «Petit Parisien», dont la collection précieuse lui a été offerte par un autre inconditionnel de l'histoire et de la littérature marocaines, Philipe Chapeau.
«Cet hebdomadaire concurrençait «Le Petit Journal » et faisait sa une des événements du Maroc. Une quarantaine de numéros montrent le retentissement de ces mêmes faits sur la population française ». Le Maroc est très présent dans la presse coloniale du fait d'un contexte particulièrement chargé en émotion. « Le petit Parisien » comble le hiatus du « Petit Journal » qui ne couvrait pas tous les événements de ces vingt années critiques », précise encore l'auteur.
Toutefois, le docteur Robert Chastel ne s'arrêtera pas là, puisqu'il prévoit, la sortie en mars 2011, d'un autre ouvrage de l'après 1907, marqué par la signature du traité de Protectorat le 30 mars 1912 et l'avènement du règne de Moulay Youssef en octobre de la même année. Une période lourde de conséquences où le Maroc débutera son histoire des temps modernes.